Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/381

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— Mes remarques seules me dictaient ce langage ; j’avais attentivement observé votre sœur pendant mes deux dernières visites à votre famille, et j’étais persuadé de son attachement pour Bingley.

— Et l’assurance que vous lui donnâtes, je suppose, l’en a aussitôt convaincu ?

— Oui, Bingley est d’une modestie sans égale ; sa défiance de soi-même l’avait empêché de s’en rapporter à son propre jugement dans une affaire si intéressante, mais voyant ses espérances confirmées par son ami, il s’y livra bientôt avec une assurance entière. Je fus obligé de lui avouer une chose qui, pour quelque temps et avec justice, l’irrita contre moi ; je ne pouvais me permettre de lui laisser ignorer davantage que votre sœur avait passé trois mois à Londres l’hiver dernier, que je l’avais vue, et le lui avais à dessein caché : il en fut très piqué, mais son courroux ne dura qu’autant qu’il lui resta encore quelques doutes sur les sentiments de votre sœur. Maintenant il m’a sincèrement pardonné. »

Élisabeth eut bien quelque envie de remarquer ici que M. Bingley avait été l’ami le plus commode du monde, si facile à conduire, à diriger, qu’il était d’un prix inestimable, mais elle sut vaincre ce désir, se rappelant que Darcy n’avait pas encore appris à se prêter aux plaisanteries, et que ce serait peut-être l’essayer un peu promptement.

En parlant du bonheur de Bingley, qui ne pouvait être que l’égal du sien, Darcy continua la conversation jusqu’à leur arrivée à Longbourn.