Page:Austen - Orgueil et préjugé, 1966.djvu/9

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— Je ne tousse pas pour m’amuser, reprit Kitty d’un ton aigre.

— Quand donne-t-on le premier bal, Lizzy ?

— Dans quinze jours.

— Ah, ah ! cela est vrai, s’écria la mère, et Mme Long ne reviendra ici que la veille, il sera donc impossible qu’elle nous présente M. Bingley, elle ne le connaîtra pas elle-même.

— Alors, ma chère, vous pourrez vous-même lui présenter M. Bingley.

— C’est impossible, monsieur Bennet, impossible, puisque je ne le connais pas ; comment pouvez-vous être si taquin.

— J’admire votre prudence ! Il est vrai que quinze jours de connaissance ne suffisent pas pour bien connaître un homme ; mais si nous ne le présentons pas à Mme Long, quelque autre le fera, et après tout il faut qu’elle et ses nièces courent leur chance comme les autres ; ainsi, puisqu’elle croira qu’on lui rend un service, si vous ne voulez pas vous en charger, je le ferai moi-même. »

Ses filles le regardèrent fixement ; Mme Bennet dit en haussant les épaules : « Quelle bêtise !

— Que voulez-vous dire, ma chère, par cette exclamation ?

Regardez-vous l’usage de présenter et le cas qu’on en fait comme une bêtise ? Je ne suis pas d’accord avec vous sur ce point. Qu’en dis-tu, Mary, toi qui es une fille réfléchie, qui lis des livres savants et fais des extraits ? »

Mary désirait faire une réponse spirituelle, mais ne savait trop comment s’en acquitter.

« Pendant que Mary pense à ma question, reprit-il, revenons à M. Bingley.

— Je suis lasse d’en entendre parler, s’écria Mme Bennet.

— J’en suis fâché ; mais que ne me le disiez-vous plutôt ; si j’avais su cela hier, je ne lui eus certainement pas fait visite ; c’est malheureux, mais puisque j’y suis allé, nous ne pouvons éviter de faire connaissance avec lui. »

L’étonnement que témoignèrent ces dames fit grand plaisir à M. Bennet ;