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plaisirs du monde où elle avait beaucoup vécu, ni la condition présente, pas plus que la maladie ou le chagrin, n’avaient fermé son cœur, ni éteint sa gaîté.

À la seconde visite, elle causa très librement, et l’étonnement d’Anna redoubla. Elle ne pouvait guère imaginer une situation plus triste que celle de son amie. Elle avait perdu un mari qu’elle adorait, une fortune à laquelle elle était accoutumée ; elle n’avait pas d’enfants pour la rattacher à la vie et au bonheur ; aucun parent pour l’aider dans des affaires embarrassées ; pas même de santé pour supporter tout le reste.

Elle s’accommodait d’un parloir bruyant, et d’une chambre obscure par derrière ; elle ne pouvait bouger sans l’aide de l’unique servante de l’hôtel, et elle ne sortait que pour être portée aux bains chauds. En dépit de tout cela, Anna avait lieu de croire que son amie n’avait que des minutes de langueur et d’accablement, contre des heures d’activité et de distraction.

Comment cela se pouvait-il !

Elle conclut que ce n’était pas seulement de la force et de la résignation. Une âme soumise peut être patiente ; une forte intelligence peut être courageuse ; mais il y avait là quelque chose de plus : cette élasticité d’esprit. Cette disposition à être con-