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LA VIE RURALE.

 
On s’étonne aujourd’hui, quand on reprend ton livre,
D’y voir que la leçon est toujours bonne à suivre ;
Et mes jeunes fermiers, s’ils savaient le latin,
Y trouveraient encor plus d’un avis certain.
C’est très-beau, je le dis, mais un peu froid peut-être.
Oserai-je tout bas te l’avouer, ô maître,
Moi qui ne suis pourtant qu’un indigne écolier ?
J’aimerais mieux parfois un vers plus familier.
J’aime assez qu’un poëte, en tunique de chambre,
Me dise : « Un jour d’avril, un matin de décembre,
J’ai fait ceci, j’ai vu cela ; j’ai rencontré,
En revenant du bois, un visage à mon gré ;
Tel ami, dont l’enclos touche à mon héritage,
Vint hier sans façon et goûta mon potage. »
Le propos, dira-t-on, est sans gêne ; tant mieux.
Pascal traite le moi de pronom odieux ;
Pascal se montre là beaucoup trop janséniste.
Bref, dût-on m’accuser de penchant égoïste,
Je ne hais pas du tout le pronom personnel.
Ce qui m’est odieux, c’est le ton solennel,
C’est l’accent magistral du professeur en chaire.
La trivialité m’est peut-être plus chère.
Tel mot que le censeur, de son doigt irrité,
Souligne, a tout au moins un son de vérité.