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LA VIE RURALE.

Que cette voyageuse, en nos vallons perdue,
Sur le blé du hangar qui touche à la maison,
A mis au monde un fils, un beau petit garçon.
Pendant que l’ouragan secouait la muraille,
Que les gouttes de pluie y tombaient sur la paille,
Il est né cette nuit sans se faire annoncer.
En vérité, petit, c’est beaucoup se presser.
Mais n’importe, chacun se sent l’âme touchée ;
On accourt, on s’empresse autour de l’accouchée.
On rit au nouveau-né, dont le vagissement
À côté des brebis semble un doux bêlement.
Ma femme est là, riant et pleurant ; elle assiste
La mère qui lui rend un beau sourire triste.
Elle fait appeler le médecin du lieu,
Elle bénit l’enfant qui vient au nom de Dieu.
Le pauvre ange ! il est nu : certe, il faut qu’on l’habille ;
Et l’on court au trousseau qui servit pour ma fille,
À ces chers souvenirs que chacun reconnaît.
On reprend au tiroir les langes, le bonnet,
Ce beau petit bonnet de guipure un peu rousse
Où l’on respire encore une odeur vague et douce ;
Le manteau baptismal qui retombe à longs plis,
Tout ce linge adoré, de la couleur des lis.
Si bien que le marmot, ange qui bat des ailes,