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LA VIE RURALE.

(Et saurions-nous jamais nous en sevrer une heure ?),
Ta fille aux jours naissants, ta fille qui n’a pas
Sur le sol fait encor l’ébauche de ses pas !
Que ce soit dans les fleurs, à l’ombre d’une haie,
Qu’on aventure enfin sa marche, qu’on l’essaie
À se tenir debout, et seule, sans soutien,
À courir une fois de mon cœur jusqu’au tien.
Croissez pour ce jour-là, verts tapis, tendres mousses !
À ces pieds nus, gazons, épargnez les secousses !
Oiseaux, enseignez-lui des mots pleins de douceur ;
Lis des champs, dites-lui : « Bonjour, petite sœur ! »
Je veux que, par degrés, cette âme se compose
Du miel et du parfum qu’exhale toute chose ;
Que du cristal de l’onde elle ait la pureté,
Qu’elle ait du frais matin l’immortelle clarté ;
Que toute impression, suave ou solennelle,
Pénètre jour à jour et sans fin reste en elle ;
Que sur le front sans cesse, exempte de tout mal,
Elle garde le baume et le sel baptismal ;
Et que ce monde enfin, sur qui son regard brille,
Reconnaisse la mère au charme de la fille !