Page:Autran - Œuvres complètes, t2, 1875.djvu/391

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
380
LA VIE RURALE.

Et tel que je connais pour un homme entendu,
Héritier du domaine, eût bien vite vendu :
Vite, il eût de ce sol, dont il voit les cultures
De la grêle et du vent courir les aventures,
Vite, il eût de ces bois au labyrinthe vert,
Qui ne produisent rien que fagots pour l’hiver,
Vite, il eût de ces fleurs dont on ne saurait vivre,
Fait un chiffre quelconque inscrit sur le Grand-Livre,
Ou chez l’agioteur, avec son bulletin,
Un placement très-gros, s’il n’est pas très-certain.
Pensons-y toutefois, et, moins prompt en affaire,
Permets, un jour encor, permets que je diffère.

L’or a bien des attraits, tu le dis, j’en conviens ;
Mais la terre où l’on vit n’a-t-elle pas les siens ?
Eh quoi ! ce frais vallon, cette riante plaine,
Ces jardins, où le soir embaume son haleine,
Ces coteaux que la vigne orne de cent festons,
Ces prés aimés du pâtre et blanchis de moutons,
Ces taillis où, l’été, sous le frêne et le tremble,
Pour boire la fraîcheur, en famille, on s’assemble,
Ne valent-ils donc pas, devant le cœur humain,
L’or que le vieux Shylock fait sonner dans sa main ?
Quoi ! ce calme horizon dont la paix vous entoure,