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LA VIE RURALE.

As-tu cet œil perçant qui voit et lit dans l’ombre,
Et qui déchiffre un être en ses replis sans nombre ?
Discernes-tu l’enfant inerte du rétif ?…
Es-tu sévère et doux ? — patient ? — attentif ?
Es-tu juste ? es-tu droit comme doit l’être un juge ?
Au coupable, qui va du prétexte au refuge,
Sauras-tu, sans faiblir, prescrire un châtiment,
Quand tu voudrais peut-être, ému secrètement,
Et sauvant à regret la forme extérieure,
Serrer entre tes bras ce bel enfant qui pleure ?…
Aimes-tu ton pays d’un généreux amour ?
As-tu l’ambition de lui donner un jour
De nouveaux serviteurs, qui, braves dès l’enfance,
Voudront sous le drapeau mourir pour sa défense ?…
Quoi de plus ? habillé, nourri de charité,
Ne souffriras-tu pas de tant d’austérité,
Et, de ton pauvre seuil, verras-tu sans envie
Ceux qui vont moissonnant les roses de la vie ?

Si toutes ces vertus, jeune homme, sont en toi,
Avec celle qui fait les prodiges — la foi !
Va, ne balance plus : au village où nous sommes,
Façonne des esprits et des cœurs, fais des hommes !
Et ne compte jamais sur le prix mérité.