Page:Auvray - Le Banquet des Muses, 1865.djvu/46

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Je vy dans un pastis des gloutonnes sang-suës,
Sucçant le bien d’autruy, s’emplir de sang humain,
Et d’un coq gigantal les poules dissoluës
Qui rongeoient jusqu’aux os l’honneur de leur prochain.

La glapissante voix de ces poules jazardes
J’entendois murmurer aux foyers des voisins,
Quand un affreux scadron d’infernalles lezardes
Emporta loin le coq la poule et les poussins.

Je vy sous un baril l’aurore matinale,
Lasse des froids baisers de son vieillard espoux,
Prendre furtivement le dard de son cephale
Qui brassoit la vandange entre ses deux genoux.

Dans les prez bondissoit une gaillarde poutre
A qui l’oestre d’amour aiguillonnoit la peau,
Qui brusloit d’un desir de se faire tout-outre,
Par un franc chevalier de l’ordre du cordeau.

Il est vray qu’il aura fortune assez prospere,
Pourveu qu’en femme il soit bien-heureux desormais,
Car qu’il porte avec soy le colier de son pere
Et s’il gaigne tousjours il ne perdra jamais.

Mon extaze passant ses regulieres bornes,
Me transporte en l’obscur d’un solitaire bois,
Dont les chesnes branchus ne portoient que des cornes
Que l’oiseau de Thronax anime de sa voix.

Lors le spectre je vy d’une grand’femme morte
Qui me dit, Polidor, voici où j’ay vescu ;
Cet oyseau vergougneux qui chante de la sorte
C’est mon sot de mary transformé en cocu !