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Page:Avenel - Histoire de la presse française, 1900.djvu/20

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les presses secrètes des imprimeurs de profession, défense qui, dans la suite, fut bien souvent renouvelée.

Avec le règne de Charles IX, la Réforme, qui avait été jusque-là une secte religieuse, devient une faction dans l’État. A la suite de la conjuration d’Amboise et après le massacre de Vassy, on voit se dérouler le triste cortège des guerres civiles, la sédition, le régicide, le meurtre et l’assassinat. Aux catholiques comme aux protestants on peut appliquer les vers indignés de Ronsard ; car les uns et les autres prêchent et soutiennent

  ……Une doctrine armée,
Un Christ empistolé, tout noirci de fumée,
Qui, comme un Méhémet, va portant en la main
Un large coutelas rouge de sang humain.

La Saint-Barthélémy, ce coup d’état sanglant, cette oppression impitoyable de la liberté de conscience, ne fait qu’exalter et exaspérer les protestants et les stimule dans leur résistance. Elle est en même temps comme le signal d’un débordement de pamphlets, d’une véritable guerre de plume. Hotoman, Simon Goulard, Hubert Languet, Buchanan et toute une légion de pamphlétaires anonymes s’attaquent au pouvoir monarchique, essayant de retrouver dans nos vieilles traditions nationales quelques traces de liberté, assimilant en quelque sorte à l’histoire républicaine de la Grèce et de Rome l’histoire des Germains, des Mérovingiens et des Carlovingiens, encourageant et prêchant l’insurrection à main armée, invoquant contre les tyrans l’exemple des vengeances célestes rapportées dans l’histoire des Hébreux ou dans les histoires grecque et romaine. Les membres de la famille royale sont outragés et invectives avec une rare brutalité, dans des pamphlets tels que la France Turquie et le Discours merveilleux de la vie, actions et déportements de Catherine de Médicis.

Ces circonstances extraordinaires, l’esprit de révolte et de sédition soufflant avec violence dans toute la France, suffisent à expliquer les nouvelles rigueurs édictées par la royauté contre la presse. Une ordonnance de Charles IX du 17 janvier 1661 s’exprime ainsi : « Voulons que tous imprimeurs, semeurs de placards et libelles diffamatoires