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Paris, Clavière, le futur ministre de la Gironde, La Fayette, Carra, Gorsas, enfin le comte de Mirabeau[1].

Mais Paris n’absorbe pas à lui seul, comme on serait tenté de le penser, la direction du mouvement. Personne ne s’en désintéresse, même au fond des provinces. Les écrits du comte d’Entraigues et de Rabaut-Saint-Etienne en Languedoc, de Mounier en Dauphiné, de Volney à Rennes et à Angers, de Kervélégen et de Gleizen en Bretagne sont là pour attester l’activité des esprits dans la France entière à l’unisson de Paris[2].

Le plus violent de ces écrits est assurément celui du comte d’Entraigues : Mémoire sur les États Généraux, leurs droits et la manière de les convoquer. Il débute par une apologie de la République et un anathème contre la Monarchie. « Ce fut sans doute, dit-il, pour donner aux plus héroïques vertus une patrie digne d’elles, que le ciel voulut qu’il existât des républiques ; et peut-être, pour punir l’ambition des hommes, il permit qu’il s’élevât de grands empires, des rois et des maitres. » Il dénonce toutes les cours, sans distinction aucune, comme des foyers de corruption, tous les courtisans comme des ennemis naturels de l’ordre public, comme une foule avilie d’esclaves à la fois insolents et bas, la noblesse héréditaire comme le plus épouvantable fléau, dont le ciel dans sa colère pût frapper une nation libre. Il répète que le Tiers est le peuple et que le peuple est l’Etat lui-même, que, dans le peuple réside la toute-puissance nationale. Et il s’écrie « qu’il n’est aucune sorte de désordres qui ne soit préférable à la tranquillité funeste que procure le pouvoir absolu ».

La brochure du comte d’Entraigues produisit autant et peut-être plus d’effet que la France libre, où Camille Desmoulins discutait ouvertement et d’une manière méthodique l’établissement de la République.

Parmi les autres écrits qui eurent le plus de retentissement, il

  1. La Presse clandestine à la fin de l’ancien régime, par H. Carré, dans la revue : la Révolution française du 14 février 1894.
  2. Archives parlementaires, t. I, p. 563 et suivantes, chapitre intitulé : « Notice de quelques-uns des écrits politiques les plus influents qui ont précédé l’ouverture des États Genéraux. » Réimpression de l’Ancien Moniteur, introduction hisrique. Paris, Plon frères, 1851.