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Page:Aviler - Dictionnaire d’architecture civile et hydraulique.djvu/42

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AQU — ARA

partie des maiſons qui ſont dans le fond. Enfin, pour terminer cette notice des ouvrages des Romains, diſons que Jules Frontin, Conſul qui avoit la direction des Aqueducs ſous l’Empereur Nerva, parle de neuf Aqueducs, qui avoient 13594 tuyaux d’un pouce de diametre. Par ce moyen il entroit, ſuivant Vigenere, dans l’eſpace de vingt-quatre heures plus de cinq cens mille muids d’eau dans Rome.

Nous n’élevons point aujourd’hui de bâtimens auſſi conſidérables que ceux des Romains ; mais nos monumens ne ſont ni moins utiles, ni moins admirables que les leurs. L’Aqueduc que Louis le Grand a fait bâtir proche Maintenon pour porter les eaux de la riviere de Bucq à Verſailles, eſt peut-être le plus grand Aqueduc qui ſoit à préſent dans l’univers. Il eſt de trente-cinq mille pieds de long, & a deux cens quarante-deux arcades. Les Aqueducs d’Arcueil & de Marly, quoique moins conſidérables, ſont encore dignes d’attention. Ces Bâtimens ſont conſtruits, comme preſque tous les autres de même eſpéce ; ſont conſtruits, dis-je, à travers les vallées & les fondrieres, & compoſés de trumeaux & d’arcades. Quand ces arcades n’ont qu’un rang, c’eſt un Aqueduc ſimple ; il eſt double ou triple lorſqu’il y a deux ou trois rangs. Tel eſt le pont du Gard en Languedoc, & l’Aqueduc de Belgrade à trois ou quatre lieues de Conſtantinople, qui fournit de l’eau à cette grande ville. Un Aqueduc eſt encore dit double ou triple, lorſqu’il a trois conduits ſur une même ligne, l’une au-deſſus de l’autre ; comme celui qui, ſelon Procope, fut bâti par Coſroès, Roi de Perſe, pour la ville de Petrée en Mingrelie, afin que le cours de l’eau ne fut pas ſi facilement coupé à cette ville en cas de ſiége.

Nous n’avons parlé juſqu’ici que des Aqueducs élevés. Ceux qu’on conſtruit en terre, ne ſont pas moins dignes de notre attention. La grandeur des Romains dans la conſtruction de ces Aqueducs ne ſe dément point ici. On compte parmi ſes merveilles les Cloaques de Rome, ou les Aqueducs ſoûterreins. Ils s’étendoient ſous toute la ville, & ſe ſubdiviſoient en pluſieurs branches, qui ſe déchargeoient dans la riviere. C’étoient de grandes & hautes voûtes bâties ſolidement, ſous leſquelles on alloit en bateau. Cela offroit un je ne ſçai quoi de grand & de merveilleux, qui faiſoit dire à Pline que la ville étoit ſuſpendue en l’air, & qu’on navigeoit ſous les maiſons. Auſſi penſoit-il que cet Aqueduc étoit le plus grand Ouvrage qu’on ait jamais entrepris. À côté de ces voûtes, chargées du pavé des rues, croient des paſſages où des charrettes remplies de foin pouvoient aller. Il y avoit d’eſpace en eſpace des trous par leſquels les immondices de la ville étoient précipitées dans l’Aqueduc. La quantité immenſe d’eau qui venoit des rues, y étoit auſſi déchargée. Des ruiſſeaux, qu’on y avoit détournés, rejettant promptement ces ordures dans la rivière, ne leur permettoient pas de croupir dans l’Aqueduc.

Nous ne nous arrêterons pas à apprécier la valeur intrinſeque de ce grand Ouvrage, & à comparer les frais immenſes qu’il a dû coûter, & le tems qu’on a employé à le conſtruire, avec les avantages dont il pouvoit être. Mais nous dirons un mot des Aqueducs ſoûterreins qui exiſtent actuellement, Si qui ſont des ouvrages de nos jours.

Ces Aqueducs ſont principalement ceux qui ſont conſtruits ſous le canal du Languedoc, & un ſous celui de Picardie, le premier, qui eſt celui de Meſuran, a cinq pieds de hauteur ſous clef. Il a le fond fait en voûte renverſée, pour empêcher que la vaſe ne s’y dépoſe, & qu’elle ne s’arrête dans le fond du puiſard. L’entrée de l’Aqueduc eſt élevée de ſix pieds au-deſſus du même fond, pour qu’il n’y ait que les eaux de ſuperficie qui puiſſent y paſſer ; & que trouvant cette entrée diſpoſée en penchant, elles ſe précipitent vers ſa ſortie, pour tomber dans un ſecond puiſard. M. Belidor a donné, dans, ſon Architecture Hydraulique, ſeconde partie, tom. II. liv. iv. ch. ix. la deſcription & le développement de ces Aqueducs dans de belles planches qui ſont abſolument néceſſaires pour détailler la conſtruction de ces ouvrages hydrauliques.

ARABESQUES ou MORESQUES, ſ. f. pl.