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Page:Avril de Sainte-Croix - Le Feminisme.djvu/23

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la femme. Sauf l’Égypte, qui lui accorde les mêmes droits civils qu’à l’homme, tous les pays l’oppriment. L’Inde ne lui laisse aucune personnalité ; elle y est absolument la chose de l’homme, « l’ombre de son ombre » et s’il meurt le premier, il faut qu’elle disparaisse également. Des milliers de femmes à peine formées ou à la fleur de l’âge, périssent ainsi chaque année sur le bûcher ou dans les flots du Gange. La Grèce, si éprise de beauté, si sensible aux choses de l’art et de l’intelligence, la Grèce qui connut Aspasie de Milet, l’inspiratrice de Périclès, la Grèce relègue la femme au gynécée. Si Sparte lui accorde quelques droits, ce n’est qu’à condition qu’elle reste libre de tout lien conjugal : mariée, elle est, comme ailleurs, condamnée à la réclusion, au silence de la vie privée. Être appelé femme pour un Grec constitue une injure. Toute l’utilité sociale de la femme consiste dans son rôle de génitrice : jamais la question de sa personnalité en tant qu’individu ne se pose ; jamais il n’est tenu compte de ses aspirations, de ses goûts. Partant du principe du droit de propriété de l’époux sur l’épouse, principe qui a persisté à travers les transformations sociales jusqu’à nos jours, le mari en cas d’adultère a droit de vie et de mort sur sa femme. Seule, au milieu de l’asservissement général de son sexe, la courtisane garde un semblant d’indépendance.

L’ancienne Rome n’estime pas la femme davantage. Elle est une mineure envers laquelle on renforce encore l’auctoritas tutoris en la mettant sous la dépendance de son propre fils.