Page:Azaïs - Jugement philosophique sur J.J. Rousseau et sur Voltaire.djvu/61

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ni estime ; tandis que J.-J. Rousseau finit par rebuter ses plus vrais amis.

Voltaire, dans sa vieillesse, fut loin de souffrir l’isolement et l’indigence ; mais que de peines d’un autre genre se multiplièrent sur ses dernières années ! Tandis que J.-J. Rousseau épuisait son âme dans le chagrin d’avoir vu toutes ses intentions méconnues, toute sa fierté blâmée ou dédaignée, Voltaire se dépitait contre la désolation de voir toutes les couronnes se flétrir sur sa tête affaiblie. Nul homme célèbre n’a mieux montré combien les jouissances enivrantes d’une grande renommée, rapidement acquise, sont expiées, à un certain terme par la difficulté de les soutenir. Pour ne pas survivre à sa gloire, lorsqu’il sentit que ses forces l’abandonnaient, Voltaire s’excita, non seulement par tous les stimulans de l’amour-propre, mais par le régime le plus propre à donner une vivacité artificielle ; il se précipita ainsi dans des souffrances pressées, obscures, continuelles ; et il fut loin de réussir à ranimer la force de son esprit ; ce fut seulement sa mobilité qu’il augmenta. Aussi toute composition d’une certaine étendue devint supérieure à sa puissance ; ses productions en ce genre furent