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Bernard, devenu abbé de Clairvaux, détacha de sa maison trois colonies pour fonder successivement Troisfontaines (1115), Fontenay (1118) et Foigny (1121). Le 26 octobre 1118, il part de l’abbaye de Clairvaux, accompagné de douze religieux, arrive à Châtillon-sur-Seine, descend dans la direction du sud-ouest, au travers d’épaisses forêts, et s’arrête à l’ermitage des pieux cénobites, frères Martin et Milon. Cette retraite, appelée Chastellum (petit château), était située à la pointe d’un rocher entouré de murailles, au bas de la forêt du Petit-Jailly, non loin du castrum Tullioni, propriété de la famille de Bernard, et du castrum Montis Barri, aujourd’hui Touillon et Montbard. Quelques traces de cet ermitage se distinguent encore à l’extrémité de l’étang Saint-Bernard. Une source, sortant du pied des murs, alimente l’étang : jusqu’au xvie siècle, elle passait pour miraculeuse, avec la propriété de guérir de la teigne ou râche. De là le nom de la source et de la vallée de la « Racherie[1] ».

Les religieux, que Bernard, en retournant à Clairvaux, avait mis sous la direction de son parent Godefroy de la Roche, restèrent douze ans dans cette solitude, se consacrant au défrichement de la vallée et à la pratique de toutes les vertus. Ils étaient soutenus par les préceptes et les exemples que leur avait laissés Bernard, qui semble avoir veillé avec une sollicitude toute spéciale sur l’abbaye naissante ; c’est, en effet, pour les religieux de Fontenay quil composa son premier grand ouvrage : le traité de Gradibus humilitatis et superbiœ, véritable traité de perfection chrétienne proposé aux méditations de ses moines.

Mais bientôt, le nombre des religieux s’accroissant, l’ermitage devint trop étroit. En 1130, ils durent chercher un emplacement plus vaste et descendre à un kilomètre plus bas dans la vallée, à l’intersection de celle qui est arrosée par le ruisseau de Fontenay, là même où se trouve l’abbaye actuelle. Le terrain leur fut concédé par l’évêque d’Autun, Étienne de Bâgé, et par l’oncle maternel de saint Bernard, Rainard de Montbard.

  1. Les documents historiques concernant Fontenay sont abondants, mais disséminés en de nombreux cartulaires, dans les manuscrits de la Bibliothèque de Châtillon, dans des pièces d’archives, etc. M. J.-B. Corbolin, curé de Marmagne, les a réunis et coordonnés en un volume qui est actuellement la seule histoire de l’abbaye : Monographie de l’Abbaye de Fontenay, seconde fille de Clairvaux, Cîteaux, 1882. Nous ne pouvions mieux faire que de mettre ce consciencieux travail largement à contribution pour esquisser très sommairement l’histoire de la construction de Fontenay ; le but de cette étude étant surtout de faire connaître l’abbaye par une description exacte et une abondante documentation illustrée.