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CARREAUX ÉMAILLÉS

Quel devait être le pavement primitif de l’église et des salles de l’abbaye ?

Conformément aux exigences de la règle, il ne devait se composer que de dalles de pierre ou de simples carreaux de terre cuite, sans aucun décor[1], « sans mosaïques, composées de figures d’anges et de saints personnages, sur lesquels on crache et que l’on foule aux pieds, sans carreaux de diverses couleurs ». Tout au plus les carreaux pouvaient-ils présenter quelques formes géométrales, gravées à la pointe, dans la terre encore molle, comme ceux que l’on a retrouvés à la Bénisson-Dieu et qui remontent au xiie siècle.

Dans toute la Bourgogne et particulièrement dans la région d’Auxerre, dès le milieu du xiiie siècle, l’emploi des carrelages historiés et émaillés était devenu fort répandu, et il n’est pas étonnant de voir, à cette époque où la règle subissait quelques relâchements, pénétrer dans notre abbaye l’emploi de ces carreaux aux mille combinaisons ornementales.

Ils recouvraient le sol du chœur et d’une grande partie de l’église, ainsi qu’il ressort d’une pièce de procédure, en date du 10 août 1752, relative à un procès entre les religieux de Fontenay et les adjudicataires des réparations à effectuer vers 1750[2]. Le chœur ayant été surélevé, les mausolées, les tombeaux furent déplacés, et les carreaux historiés transportés dans le cloître servirent à paver deux des galeries. C’est là qu’ils furent retrouvés en très grand nombre et, depuis peu, utilisés en partie pour la décoration du chœur de l’église.

Ils sont de différentes mesures, variant entre 8 et 15 centimètres, et sont, pour la plupart, destinés à former, par leur assemblage quatre par quatre, des motifs en forme de rosaces. Tous les carreaux sont en terre cuite rouge chargée d’oxyde de fer. Les uns portent un dessin simplement estampé en creux, à l’aide d’une matrice, dans l’argile encore malléable et sont recouverts d’un émail noir, jaune ou brun rouge. Les autres sont décorés suivant la technique usitée en

  1. Institut. capit. gen. cist., dist. I, cap. IV, ap. Nom. cist., 275. En 1235, l’abbé du Gard, ayant violé cette règle, fut condamné à démolir son pavé (d’Arbois de Jubainville, ouvrage cité, p. 28).
  2. Archives de Fontenay.