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comprendre celles où l’on avait remplacé les vitres peintes par vitres blanches ».

Le clergé se charge lui-même de consommer la ruine de ces innombrables témoignages de la grandeur religieuse des siècles passés.

On rencontre même un peintre verrier, Pierre Le Vieil, qui, tout en s’indignant contre les mutilations que subissaient, de son temps, les vitraux de Saint-Merri, avoue, dans son traité de la peinture sur verre[1], avoir démoli lui-même, en 1741, les derniers vitraux du treizième siècle qui décoraient encore le chœur de Notre-Dame de Paris, pour les remplacer par des vitres blanches, afin de fournir plus de lumière aux chanoines. Le vandalisme des Chapitres dépassait celui des calvinistes du seizième siècle : ceux-ci ne s’attaquaient qu’aux sujets à portée de leurs atteintes, tandis que les premiers détruisaient méthodiquement les verrières les plus élevées, à grands renforts de dispendieux échafaudages.

Mais, outre ces mutilations, nos vitraux étaient souvent victimes de restaurations presque toujours extrêmement maladroites, ce qu’expliquent la désuétude et l’oubli dans lesquels était tombée la pratique du vitrail. Dans notre région, en particulier, les restaurations ont dû, apparemment, être exécutées par des maçons, car les pièces de verre blanc destinées à combler les vides sont rarement assujetties par des plombs, mais souvent avec du simple mastic et même du mortier. Ces « restaurateurs » d’un nouveau genre ne se préoccupaient guère de voir une tête ou une draperie prendre la place d’une architecture ou d’un ornement ; ils professaient pour la couleur un mépris égal et le résultat de leur intervention aboutit aux mélanges les plus disparates, aux plus déconcertantes inharmonies.

Au lendemain de la tourmente révolutionnaire, l’établissement du Concordat rendit nécessaire la réparation de tant de ruines. L’art du vitrail avait totalement disparu et l’on en était réduit, comme à la fin du dix-huitième siècle, à de misérables travaux de vitrerie. Bien plus, sous prétexte de réparer, on continuait à détruire. C’est ainsi que, parmi tous les devis et mémoires produits pour la restauration de la cathédrale de Lyon, entreprise en 1802, lors du rétablissement du culte, nous trouvons que « le raccommodage en verres de couleurs de

  1. Pierre Le Vieil, l’Art de la peinture sur verre et de la vitrerie, 1784.