Page:Béland - Mille et un jours en prison à Berlin, 1919.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

petite ouverture d’environ un pouce de diamètre pour permettre aux gardes de voir à l’intérieur.

L’inspection de la prison se faisait tous les jours vers dix heures. C’était un sergent-major, celui-là même auquel j’avais été remis, à mon arrivée, qui s’amenait à chaque étage, se faisait ouvrir la porte de chacune des cellules par un sous-officier, et promenait un regard scrutateur et hautain sur la cellule et ses occupants.

Personne ne m’avait prévenu qu’une inspection aurait lieu peu de temps après mon arrivée dans la cellule que l’on m’avait assignée : assis à la table, ayant le dos à demi tourné à la porte, absorbé dans un monde de pensées diverses, et distrait par la dégustation de mon pain noir, je n’avais pas entendu ouvrir la porte. Je remarquai que le petit Robinson, s’approchant ou plutôt se glissant près de moi, tirait légèrement ma manche comme pour m’inviter à me lever. Comprenant enfin que quelque chose se passait derrière moi, je me levai et me tournai à demi. Le sergent-major, triple boche, Prussien et demi, se tenait sur le seuil de la porte raide et droit comme un i.

C’était le sergent-major Götte, — un nom et un personnage que je n’oublierai jamais. Quand il vit que tout le monde était debout, il cria d’une voix de stentor : « Guten morgen ! » À mon oreille, cela sonnait plutôt comme une injure que comme un salut matinal.