Page:Béranger, oeuvres complètes - tome 1.pdf/148

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

            Méprisant l’auteur humble et maigre
            Qui mouille un pain bis de vin aigre,
            Vous ne trouvez le laurier bon
            Que pour la sauce et le jambon ;
    Chez des Français quel étrange délire !
Ah ! pour étouffer, n’étouffons que de rire ;
    N’étouffons, n’étouffons que de rire.

            Pour goûter à point chaque mets
            À table ne causez jamais ;
            Chassez-en la plaisanterie :
            Trop de gens, dans notre patrie,
            De ses charmes étaient imbus ;
            Les bons mots ne sont qu’un abus ;
    Pourtant, messieurs, permettez-nous d’en dire.
Ah ! pour étouffer, n’étouffons que de rire ;
    N’étouffons, n’étouffons que de rire.

            Français, dînons pour le dessert :
            L’Amour y vient, Philis le sert :
            Le bouchon part, l’esprit pétille ;
            La Décence même y babille,
            Et par la Gaîté, qui prend feu,
            Se laisse coudoyer un peu.
    Chantons alors l’aï qui nous inspire.
Ah ! pour étouffer, n’étouffons que de rire ;
    N’étouffons, n’étouffons que de rire.