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caissons ennemis, avec un maigre état-major et sous escorte des mots spirituels[1] que lui avaient prêtés M. Beugnot[2] et quelques autres royalistes, nouveaux convertis.

En rapportant cette anecdote, embellie peut-être par l’homme d’esprit de qui je la tiens, mais qu’au fond je crois vraie, je ne puis m’empêcher de me rappeler M. de Vernon, cet hypothétique rejeton de Louis XIII, dont j’ai parlé plus haut. En 1814, il eût été plaisant de le voir réclamer ses droits et se donner même des airs de dévouement au salut de la France. Je crois, en vérité, que, si le peuple eût été consulté, le descendant du Masque de fer eût eu, après Napoléon et son fils, de grandes chances pour obtenir la majorité des suffrages.

Le retour prodigieux de l’Empereur, au 20 mars 1815, fut un événement tout à fait populaire. Dans cette journée d’attente cependant, on pouvait lire sur le front des hommes qui réfléchissent, et il y en a dans toutes les classes, une préoccupation qui empêchait la joie d’être générale, malgré la fascination

  1. « Il n’y a rien de changé en France il n’y a qu’un Français de plus. »
  2. Jacques-Claude Beugnot (né en 1761, mort en juin 1855), député à l’Assemblée législative, préfet sous l’Empire, puis administrateur du grand-duché de Clèves et de Berg : le gouvernement provisoire de 1814 lui avait donné le ministère de l’intérieur.