Page:Béranger - Ma biographie.djvu/252

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et s’arroge volontiers des droits sur ceux à qui il ouvre sa bourse. Ceci, je ne l’osais dire alors. Cette souscription, grâce au zèle des jeunes gens, n’échoua pas ; mais peu s’en fallut, et, sans M. Bérard, qui la compléta, j’aurais été obligé d’y mettre du mien.

Après la Révolution de juillet, le comité des secours accordé aux condamnés de la Restauration me fit proposer une rente de six cents francs, pour ma part, dans les indemnités que donnait le gouvernement. Je refusai : il y avait des victimes dont les besoins étaient autrement pressants que les miens. L’ouvrier, père de famille, qu’on emprisonne, est bien plus à plaindre que l’homme de lettres, qui, même sous les verrous, s’il est un peu isolé, peut encore travailler à sa réputation et à sa fortune.

On sent que je ne parle ici que de l’emprisonnement en France, et non de ce qui a lieu pour les prisonniers politiques de l’Autriche, de la Russie, du pape, des Turcs et autres barbares.

C’est à la Force que V. Hugo[1] vint faire ma connaissance et m’amena bientôt Sainte-Beuve[2]. Alex. Dumas[3] m’arriva aussi, tout resplendissant de son premier succès au théâtre. Leurs visites furent le

  1. Marie-Victor Hugo, né à Besançon le 26 février 1802.
  2. Charles-Auguste Sainte-Beuve, né à Boulogne-sur-Mer, le 25 décembre 1804.
  3. Né à Villers-Cotterets, le 24 juillet 1805.