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Page:Béranger - Ma biographie.djvu/255

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Puisque je suis en train de parler langue, je veux dire combien, sous ce rapport, le poëme de Jocelyn, à part toutes ses autres beautés, me paraît une œuvre merveilleuse. Il y a, sans doute, un bien grand talent dans la Chute d’un Ange ; mais je n’ai jamais vu, comme dans Jocelyn, le style que nous nommons racinien entrer profondément dans les détails de la vie intime, presque à tous ses degrés. Jamais ce vers ne s’est plié aux peintures et aux narrations les plus difficiles avec autant d’aisance et de vérité, tout en conservant son élégance et son harmonie. C’est là un très-grand progrès pour notre poésie : désormais elle peut tout dire et tout peindre.

Je sais qu’il y a, dans Jocelyn, des négligences et des longueurs, mais il fourmille d’assez grandes beautés pour faire passer sur quelques taches qu’il serait d’ailleurs si facile de faire disparaître. Si un pareil poëte eût pu nous venir d’outre-Rhin et d’outre-Manche, nous n’aurions pas eu assez de voix pour crier au miracle.

Il esi temps de retourner en prison pour quelques heures encore.

La police craignait que ma sortie de la Force ne fût l’occasion de manifestations bruyantes autour de cette maison : comme je les redoutais au moins autant qu’elle, j’avais eu soin de tromper mes amis sur le jour de ma délivrance. Le directeur ne m’en ré-