propres affaires, il fallait que le genre qu’on disait être l’expression des sentiments populaires prît enfin tous les tons pour répondre à ces mêmes sentiments. L’éloge de l’amour et du vin ne devait être le plus souvent que le cadre des idées qu’il fallait que la chanson exprimât désormais, au moins à une époque où toutes les circonstances un peu importantes réagissaient sur des masses nombreuses et sur des individus plus éclairés. (Note de Béranger.)
Peu de temps après la seconde Restauration, Désaugiers fut nommé directeur du théâtre du Vaudeville. Béranger voyait encore fréquemment cet homme aimable, qui, jusque-là, avait semblé respecter les opinions de ceux qui ne pensaient ni n’agissaient comme lui. Il se fit un plaisir de lui adresser cette chanson, où à des éloges mérités se mêlaient quelques idées patriotiques.
Dans les éditions de 1821 et suivantes, Béranger eût éprouvé de la peine, quoique toute intimité eût cessé entre Désaugiers et lui, à effacer le mot ami, placé en tête de cette chanson. Il connaissait trop bien Désaugiers pour lui en vouloir de quelques torts de conduite, qui tenaient à la faiblesse de son caractère, et que même il n’aurait jamais eus, s’il n’eût été entouré que d’amis véritables. Ce joyeux chansonnier fit lui-même savoir à Béranger combien il regrettait de n’avoir pas continué d’être en rapport avec lui. Ce regret était partagé. Mais un des résultats les plus tristes des dissensions politiques, c’est que, non-seulement elles divisent les hommes les plus faits pour s’aimer, mais que le temps, en rapprochant enfin les partis les plus opposés,