Page:Béranger - Ma biographie.djvu/64

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avec désespoir dès les premières réponses qui me furent faites, avec une dureté qui m’intimida et m’empêcha peut-être de dire et de faire ce qu’il eût fallu. Personne ne nous écoute, ne nous aide, nous autres petites gens. Oh ! si j’avais pu savoir ce qu’il était devenu ! Pour l’avoir, pour l’élever, que n’aurais-je pas donné ! que de nuits j’aurais consenti à passer au travail, en outre de celles que je passais déjà ! Après de longues années de sollicitations, une des sœurs de la maison prit enfin pitié de moi. Elle feuilleta les registres, trouva, à l’époque indiquée, un nouveau baptisé du nom de Paul ; écrivit dans l’endroit éloigné où il avait été envoyé et d’où l’on répondit que, la nourrice et son mari étant morts, l’enfant, âgé de huit ans, avait été confié à un voyageur riche que sa bonne mine avait intéressé. Depuis on n’en avait plus entendu parler, et le curé du lieu avait oublié le nom du voyageur et son pays.

« C’était bien peu de chose pour une mère que ces détails ; pourtant ils me causèrent une grande joie. Mon fils avait échappé aux premières maladies de l’enfance ; il devait vivre ; il vivait. Plus j’y pensais et plus j’en étais convaincue. Tous mes rêves me semblaient dire d’espérer.

« Depuis lors j’ai vécu avec ce cher fils, avec mon Paul ; non-seulement en le cherchant partout, autant que je le puis dans ma vie de travail, mais en m’en