Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 1.djvu/184

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Sud. La Méditerranée de son temps est divisée en deux domaines. Dans les eaux du Levant, les Achéens font la guerre, la course et le commerce : ils vont prendre du service, s’éjouir et s’enrichir à Thèbes d’Égypte, — le Paris d’alors, — trafiquer à Sidon, guerroyer sous Troie, pirater et enlever la toison d’or jusqu’au fond de la Mer Noire ; ils y sont conquistadores, corsaires et traitants ; Ulysse y a gagné le surnom de « pilleur de ville », ptoliporthos. Il change soudain de vie dans les eaux du Couchant ; il devient un descobridor pacifique, qui cherche les passes, à seule fin de trouver le chemin du retour, et qui visite les villes, à seule fin d’en « connaître les hommes et leur esprit ». S’il va chez le Cyclope, c’est « pour tâter ces gens et savoir ce qu’ils sont, des bandits sans justice, un peuple de sauvages ou des gens accueillants qui respectent les dieux ».

Cette Mer du Couchant, emplie de merveilles, est vide de navigateurs, semble-t-il : on n’y rencontre pas le moindre pirate, pas la moindre voile. Jamais, du moins, ne retentit sur les vaisseaux d’Ulysse le cri du guetteur signalant à l’horizon une prise à faire ou un ennemi à fuir. Jamais une rixe ne met aux mains les équipages de marines rivales. Jamais on n’y renouvelle quelque descente en armes. On vole