Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 1.djvu/223

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Sirènes, tout ensemble, fascinent et connaissent toutes les histoires du passé et toutes les nouvelles du présent. Ulysse attaché entend leur cantique :

Viens ici ! viens à nous ! Ulysse tant vanté ! l’honneur de l’Achaïe !… Arrête ton croiseur : viens écouter nos voix ! Jamais un noir vaisseau n’a doublé notre cap, sans ouïr les doux airs qui sortent de nos lèvres ; puis on s’en va content et plus riche en savoir, car nous savons les maux, tous les maux que les dieux, dans les champs de Troade, ont infligés aux gens et d’Argos et de Troie, et nous savons aussi tout ce que voit passer la terre nourricière.

Chaque épisode odysséen nous fournirait d’autres exemples : l’explication des noms propres par l’aventure ou plutôt la création de l’aventure pour l’explication du nom propre est l’un des phénomènes constants de cette Poésie. Ne doit-on pas y voir un indice presque certain d’origine ?

N’imagine-t-on pas un auteur sémitique jonglant ainsi avec les mots de sa langue, plus facilement qu’un poète grec jouant avec les termes d’une langue étrangère ? Pareils jeux de mots supposent l’usage du parler maternel, — à moins que le poète grec, comme saint Jérôme traduisant la Bible, n’ait eu près de lui son drogman, — « mon Hébreu », dit saint