Page:Bérard - La résurrection d’Homère, 1930, 2.djvu/94

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charmerait les dieux. C’est par là qu’après tout, ils devaient en finir : leur perte était fatale, du jour que leur muraille avait emprisonné ce grand cheval de bois, où tous les chefs d’Argos apportaient aux Troyens le meurtre et le trépas… Et l’aède chanta la ville ravagée et, jaillis du cheval, les Achéens quittant le creux de l’embuscade, et chacun d’eux pillant son coin de ville haute, et, brave comme Arès, Ulysse accompagnant le divin Ménélas jusque chez Déiphobe, et tous deux affrontant la plus dure des luttes et devant leur victoire au grand cœur d’Athéna.

Ce second festin et cette seconde audition de l’aède font partie de la longue interpolation des Jeux, dont nous avons constaté déjà la « bâtardise » et qui n’est ni de la même main ni de la même date que le reste des Récits chez Alkinoos. S’il en fallait une nouvelle preuve, on la trouverait aussitôt dans certains de ses mots qui sonnent étrangement devant des rois de droit divin ; ils ne peuvent convenir qu’à une cité récente de la Grèce démocratique : ce sont des magistrats choisis dans le peuple, des aisymnètes, qui préparent l’arène ; le mot ne se retrouve qu’en une grossière interpolation de l’Iliade. Tout respire la démocratie en cet épisode où les personnages estimés et admirés du public sont, non plus les nobles et les braves, mais l’athlète et l’orateur ; cinq vers, qui ne sauraient disparaître, sont,