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WOZZECK

monde et dans l’autre ! Je crois que si nous entrions au ciel, nous devrions aider à lancer le tonnerre !

Le capitaine. — Wozzeck ! Tu n’as pas de vertu, tu n’es pas un homme vertueux ! Chair et sang ? Quand je suis à la fenêtre, après la pluie, et que je regarde les bas blancs qui courent dans la rue — malédiction ! Wozzeck, alors l’amour me vient ! Moi aussi j’ai de la chair et du sang ! Mais, Wozzeck, la vertu ! la vertu ! Comment en ce cas passer mon temps ? — Je me dis toujours : tu es un homme vertueux (avec émotion), un brave homme, un brave homme !

Wozzeck. — Oui, monsieur le capitaine, la vertu — ce n’est pas encore bien clair pour moi. Voyez-vous, nous autres gens vulgaires, nous n’avons pas de vertu ; nous obéissons simplement à la nature. Mais si j’étais un « Monsieur » si j’avais un chapeau, une montre, un lorgnon, si je savais parler élégamment, je serais certainement vertueux. Ça doit être une belle chose que la vertu, monsieur le capitaine, mais moi je suis un pauvre diable.

Le capitaine. — Bien, Wozzeck, tu es un brave homme, un brave homme. Mais tu penses trop, cela consume ; tu parais toujours si haletant ! Cette conversation m’a affaibli. Va maintenant, et ne cours pas ainsi, descends lentement, très lentement la rue, juste au milieu !

PLACE PUBLIQUE. BARAQUES.
PEUPLE. WOZZECK. MARIE.
Un vieillard et un enfant (dansent et chantent) :

En ce monde rien ne dure ;
Nous devons tous mourir, nous le savons bien.
Heissassa ! Hopssassa !