Strasbourg, 1836.
Cher ami,
Me suis-je tu assez longtemps? Que dois-je vous dire ? Moi aussi j’ai été en prison, et dans la plus ennuyeuse qui soit sous le soleil : j’ai passé jour et nuit à un travail en règle sur l’histoire, qui me dégoûte ; je ne sais vraiment comment j’ai eu cette patience ! Mais j’ai l’idée arrêtée de faire à Zürich, dans le prochain semestre, un cours sur le développement de la philosophie allemande depuis Descartes ; il me faut pour cela mon diplôme, et les gens ne paraissent nullement disposés à coiffer mon cher fils Danton du bonnet de docteur.
Que devais-je faire ?
Vous êtes à Francfort, en pleine sécurité !
Je suis fâché et en même temps content que vous n’ayez pas encore frappé à la porte du Rebstœckel 1. Pour ce qui concerne l’état de la littérature moderne en Allemagne, j’en sais autant que rien ; j’ai simplement lu quelques brochures qui, j’ignore comment, me sont venues d’au delà du Rhin.
Il se manifeste dans la guerre qu’on vous fait une bassesse profonde, une bassesse vraiment robuste; je ne m’explique pas comment nous pouvons être encore aussi
1. Un hôtel de Strasbourg. (Note du traducteur).