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peu de femmes s’en chaussent-elles avant trente ans ?

Peut-être parce que pour exprimer des sentiments, il faut les avoir éprouvés ; pour raconter des péripéties, y avoir joué un rôle ; peut-être aussi parce qu’au printemps de la vie, la sève amoureuse bouillonne trop violemment et ne laisse pas à l’esprit le loisir d’analyser des sensations. Mais ne nous éloignons pas de madame Priscaillet qui, n’étant plus jeune, voulait entrer dans la république des lettres.

C’est, en somme, bien simple, se dit-elle ; je vais composer un roman, je le ferai éditer, je serai reçue membre de la Société des gens de lettres et le tour sera joué. Tout doucement j’éliminerai de mon salon les papillons désormais inutiles, je les remplacerai par des journalistes, des auteurs ; je donnerai de bons dîners, je n’inviterai chez moi que des femmes aimables, et tout le monde me choyera comme devant.

On n’a jamais su au juste dans quelle région sociale Adèle Priscaillet a ouvert les yeux à la lumière.