Page:Bacha - Un traité des oeuvres arabes de Théodore Abou-Kurra.djvu/21

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sa mère, ses frères, ses sœurs, ses enfants et tous ses parents pour moi, n’est pas digne de moi. » Il leur dit : « Je vous laisse comme les moutons parmi les loups. » Il leur dit ailleurs : « Le monde sera dans la joie et vous dans la tristesse. » (Joan., xvi, 20.) « Des jours viennent où quiconque vous tuera, croira offrir un sacrifice à Dieu. » (Joan., xvi, 2.)

Il les obligea à se mortifier par la privation des plaisirs et l’extermination de la moindre passion en disant : « Quiconque vous frappe à la joue, présentez-lui l’autre. Celui qui veut vous arracher votre tunique, donnez-lui encore votre manteau. Si vous regardez une femme pour la convoiter, vous avez commis un adultère dans votre cœur. Si vous appelez votre ami Raca ou fou, vous méritez le feu de l’enfer. » Il dit aussi : « Vous avez entendu dire aux anciens : Tu aimeras ton ami et tu haïras ton ennemi. Et je vous dis : Aimez vos ennemis et priez pour eux. »

Dis-moi, Juif, comment les Gentils ont pu recevoir Jésus-Christ avec une loi si sévère qui les porte à se sacrifier, avec la faiblesse qu’il a voulu montrer en souffrant le crucifiement avec ses douleurs et ses opprobres. Ses ennemis l’ont insulté, ils lui ont cloué les mains et les pieds en le suspendant sur la croix ; ils lui ont fait boire du vinaigre et prendre du fiel ; ils l’ont fait tellement souffrir, qu’il a laissé couler de son corps une sueur forte comme des grumeaux de sang, et, étant sur la croix, il a crié : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » Tout cela aurait dû effaroucher ceux qui l’entendaient, et les empêcher de suivre Jésus-Christ et de le prendre pour Dieu comme les Gentils avaient fait ; car il est bien évident que si ces miracles racontés dans les Évangiles et les livres des Apôtres n’avaient pas été réellement opérés, Jésus-Christ n’aurait pas été reçu, car ce sont les miracles qui contraignaient les esprits et les obligeaient de le recevoir et de croire en lui.

Si Jésus-Christ voulait tromper (le monde), il aurait dû défendre à ses Apôtres de révéler aux Gentils ces faiblesses, et il aurait dû leur ordonner de l’exalter et de le faire plus grand et plus beau qu’il n’était ; il aurait dû les attirer par une doctrine libre et licencieuse pour rendre leur conversion plus rapide et plus facile. Mais il n’a rien fait de tout cela : il a voulu se montrer ainsi déshonoré