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Page:Bachelin - Le Serviteur.djvu/143

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LE SERVITEUR

ger. Je laissais les souches trop lourdes pour moi. Il y avait de la terre à leurs racines. Les bœufs ne bougeaient pas. Le Bibi avait dressé son aiguillon contre leur joug. C’était un obstacle qu’il ne leur venait même pas à l’idée de renverser. Parfois seulement un frisson parcourait leur robe blanche quand les mouches les harcelaient de trop près ; ils les chassaient alors d’un coup du fouet de leur queue souple. Et ils continuaient de ruminer.

Quand le déchargement avait pris fin, le Bibi entrait. À ses sabots comme aux racines des souches il y avait de la terre. Il voulait les laisser dehors, mais nous lui disions :

— Allez-vous bien garder vos sabots ! Ici, ce n’est pas un palais.

Le Bibi s’y trouvait presque dans son milieu. J’étais heureux de l’y voir ; pour un instant il complétait la physionomie de notre « maison de village ». Il s’asseyait. Il n’avait pas besoin d’une de nos fourchettes. Son couteau, fixé au gilet par un long cordon de cuir, lui en tenait lieu. Comme il était parti des bois vers deux heures du matin, il avait faim et soif. Une bouteille de vin et une omelette de quatre œufs ne