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LE SERVITEUR

fusées ambitionnaient de rejoindre les étoiles filantes, tu te couchais.

Tu n’aimais pas le Quatorze-Juillet. Avec ce que tu savais d’histoire, tu pouvais te représenter les massacres et les noyades dont il avait été le prélude. Tu voyais des hommes déguenillés parcourant les rues de Paris et portant au bout de leurs piques des têtes échevelées et défigurées. « L’œil d’une de ces têtes, sorti de son orbite, descendait sur le visage obscur du mort, la pique traversait la bouche ouverte dont les dents mordaient le fer ». Tu ne t’écriais pas dans ton indignation : Brigands ! Est-ce comme cela que vous entendez la Liberté ? Tu gardais pour toi tes idées d’héritier des « ahaniers » et de Jacques Bonhomme, de celui du moins qui acceptait son sort.

Ce soir-là les trois cloches pour tes oreilles sonnaient le tocsin. Tu t’étonnais que le canon ne fût point braqué sur l’église : il est vrai qu’il ne lui aurait pas fait grand mal.

Le jour même du Quatorze-Juillet, si toutefois ce n’était pas un dimanche, tu travaillais comme d’habitude. Ceux qui t’imitaient n’étaient pas nombreux. Que t’importaient, le matin, le