Page:Bacon - Œuvres, tome 12.djvu/144

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supposer au peuple beaucoup plus de raison et de justice qu’il n’en a communément  ; trop souvent on le voit regimber contre ce qui peut lui être utile. Encore moins doit-il juger du péril par l’importance ou la réalité des griefs tendant à soulever la multitude : car, lorsque la crainte est beaucoup plus grande que le mal, les mécontentemens publics n’en sont que plus dangereux, attendu que la douleur a une mesure, au lieu que la crainte n’en a point ; sans compter que, dans les cas où l’oppression est portée à son comble, cette oppression même qui a lassé la patience du peuple, lui ôte le courage et le pouvoir de résister. Mais il n’en est pas de même lorsqu’il n’a que des craintes. Le prince ou le gouvernement ne doit pas non plus se trop rassurer par cette seule considération, que ces mécontentemens qui se manifestent alors, ont eu lieu fréquemment, ou subsistent depuis long-temps, sans qu’il en ait encore résulté d’inconvénient notable. Car, quoique tout nua-