Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/132

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de temps pour faire réparer ses avaries ? Est-ce notre faute, à nous, si ces sauvages de roi Tsialana et de reine Binao, qui devaient nous amener des Sakalaves par milliers, n’en ont pas amené du tout ? Et puis, après tout, je suis bien bon de vous écouter. Est-ce que c’est vous qui nous procurerez les bateaux qui nous manquent ? Est-ce que c’est vous qui nous fournirez les porteurs et les auxiliaires indigènes dont nous avons besoin ? Non, n’est-ce pas ? Eh bien ! alors, faites-moi le plaisir de nous laisser tranquilles ! Serviteur ! » Et là-dessus il ouvre la porte, et me voilà dehors. Je crois même que, si je n’étais pas parti tout seul, il m’aurait parfaitement poussé par les épaules. Mais j’aurai ma revanche ! »

Or, voici quelle fut la revanche de l’oncle Daniel. Le lendemain même de sa visite malencontreuse au quartier général, il repartait pour Manakarana, où il restait quelques jours ; puis un beau matin il reparut en rade de Majunga, à la tête d’une véritable petite flottille composée de bâtiments de toute sorte, baleinières, chalands, pirogues, chaloupes, boutres arabes, avec pour vaisseau amiral son brick marchand, la Ville de Paris. Toutes ces embarcations, petites ou grandes, étaient montées par environ six cents indigènes, recrutés moitié dans le personnel des comptoirs du vieux négociant, moitié dans la région avoisinant Manakarana, grâce aux cordiales relations qu’il entretenait avec les chefs des principaux villages. Tout ce monde débarqua en bon ordre sous la surveillance de Daniel, puis, après s’être formé en cortège, traversa la ville au milieu de la curiosité générale et vint se masser devant la petite maison indienne habitée par Henri et sa sœur, où leur oncle était également descendu.