Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/179

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

un petit village abandonné ; mais la bande elle-même s’était divisée et portée à la fois sur Maroabo et sur Mahabo. Nous partîmes à sa poursuite et nous réussîmes à nous emparer de trois autres chefs que nous ramenâmes le soir même, avec les trois premiers, au camp d’Ankaboka. Je procédai à l’interrogatoire de mes prisonniers et n’eus pas de peine à reconnaître qu’ils étaient coupables tous les six d’une série de vols, de pillages, de meurtres, d’incendies, avec cette circonstance aggravante qu’ils avaient trouvé moyen de commettre tous ces brigandages au nom de la France, en se servant pour cela de faux laissez-passer signés du général Metzinger. Le conseil de guerre, réuni deux jours plus tard, les condamna tous les six à mort, après de courts débats où je figurai au double titre d’interprète et de témoin. On les emmena aussitôt ; mais à peine avaient-ils passé le seuil de la case où s’était tenue la séance du conseil qu’on entendit le bruit d’une bousculade furieuse et des cris confus. Je sortis précipitamment, et quelle ne fut pas ma surprise en reconnaissant, se débattant au milieu du groupe formé par les six condamnés et leur escorte, Naïvo, mon brave Naïvo, qui me sert d’ordonnance ! Il était venu m’apporter je ne sais quelle pièce à signer et, se trouvant sur le passage des bandits, il s’était approché pour les regarder de plus près quand tout d’un coup on l’avait vu bondir sur deux d’entre eux en poussant un cri terrible. « Mahafaty ! Jolahy ! » (Assassins ! brigands !) hurlait-il en les secouant furieusement à la gorge. Si on ne les eût arrachés de ses mains, il les étranglait. J’arrivai à ce moment. En m’apercevant, il courut à moi, et me désignant les deux hommes à demi pâmés, les nommés Andrianany