Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/192

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les distribuer lui-même, en raison des grands ménagements dont la plupart des malades avaient encore besoin.

On pense que le capitaine Gaulard ne fut pas oublié, d’autant que son état continuait à s’améliorer sensiblement, quoique trop lentement à son gré.

C’était, d’ailleurs, le plus charmant garçon du monde. D’un caractère aimable et d’un esprit élevé, il avait la plus vive reconnaissance pour les soins qui lui étaient prodigués et ne savait comment la témoigner. Aussi tout le monde l’aimait-il à l’ambulance, Marguerite d’abord dont il était le favori, puis le docteur Hugon et l’oncle Daniel. Celui-ci en était arrivé à ne plus pouvoir se passer de son capitaine, lequel avait pris sur lui un empire absolu, sans avoir rien fait pour cela ; tout au contraire, et bien qu’ils fussent aussi bons patriotes l’un que l’autre, il était difficile de rencontrer deux hommes de nature et d’humeur plus dissemblables : autant le capitaine voyait les choses du bon côté et l’avenir en rose, autant le vieux négociant grondait et grognait, n’épargnant personne dans ses critiques, et se montrant très pessimiste en ce qui concernait l’issue de la campagne. Aussi n’étaient-ils presque jamais du même avis ; c’était entre eux continuellement, à propos de tout et de rien, des discussions homériques ; ce qui ne les empêchait pas de s’estimer et de s’aimer tous les deux.

En particulier, l’histoire des fameuses caisses transportées par le Yang-Tsé et surtout l’intervention de l’Association des Dames françaises de Marseille en cette affaire, dont le vieux Daniel n’avait pas encore pris son parti, avaient provoqué entre lui et le capitaine une interminable discussion.