Page:Badin - Une famille parisienne à Madagascar avant et pendant l’Expédition, 1897.djvu/259

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s’oppose à leur fuite et ne les force à partager le sort qu’ils auront attiré sur elle. Quoi qu’il en fût, il était bien certain qu’à la Cour et dans l’entourage de la Reine régnait un désarroi absolu ; généraux, ministres, tous se rejetaient les uns sur les autres la responsabilité des événements ; la pauvre Ranavalo, laissée jusqu’à ces derniers temps dans l’ignorance la plus complète de ce qui se passait, ne savait auquel entendre. A l’armée même désordre et même irrésolution : il n’y avait ni plan, ni direction, ni unité de commandement ; les ordres les plus contradictoires, les plus grotesques, émanant de n’importe qui, arrêtaient et bouleversaient toute tentative raisonnée de résistance. La situation des officiers subalternes et des soldats était effroyable : point nourris, point payés, ils étaient menés à coups de canne au combat par leurs chefs. Les collines qui entourent Tananarive étaient fortifiées, mais les défenseurs de ces fortifications n’attendraient pas l’attaque ; dès qu’ils se verraient menacés d’être tournés, ils battraient précipitamment en retraite. Lorsque la colonne légère arriverait en vue de la capitale, il y aurait peut-être des coups de canon tirés par les artilleurs de Graves, toujours pour « sauver la face », mais quant à une défense sérieuse, à une lutte dans les rues, on pouvait assurer qu’il n’y aurait rien de semblable. Au premier obus à la mélinite, qui éclaterait dans la ville, la Reine demanderait grâce, Rainilaïarivony enverrait des parlementaires, et toute la tourbe des généraux, honneurs, officiers, soldats, disparaîtrait, s’évanouirait, comme une volée de moineaux.

C’est par cette conclusion rassurante qu’Hector La Bretèche