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Page:Baillehache - Souvenirs intimes d'un lancier de la Garde impériale, 1894.djvu/16

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le ministère de la justice, place Vendôme, ayant en face de lui au pied de la colonne d’Austerlitz les vétérans du premier Empire, dont la plupart avaient revêtu leurs anciens uniformes. Lorsque l’armée d’Orient passa devant ces vieux débris, ils attestèrent par leurs acclamations que leurs petits-fils n’avaient pas dégénéré.

A Colmar, où vint tenir garnison le 97e de ligne, les choses se passèrent plus simplement, mais n’en restèrent pas moins gravées dans mon souvenir.

J’étais allé avec mes parents chez des amis dont la maison se trouvait sur le passage de nos vaillants soldats.

Que c’était beau et à la fois triste de voir revenir ce régiment réduit à un bataillon ! Les hommes portaient sur leurs figures hâlées l’empreinte des souffrances éprouvées, mais leur œil était fier et leur allure bien martiale. Leurs longues capotes effiloquées faisaient penser aux vers de Béranger :

De quel éclat brillaient dans la bataille
Ces habits bleus par la victoire usés !

Le drapeau à la soie déchirée et noire de poudre disparaissait sous les couronnes de fleurs, tous les hommes avaient des bouquets à leurs