Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/20

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À minuit on se sépare.

— Déjà, soupira Hector.

Leurs mains se lâchèrent, puis se reprirent, puis, de nouveau, plus longuement. Il restait quelque chose à dire, un mot qui ne venait pas tout de suite, qu’ils pensaient dans leur tête, qu’ils pensaient dans leurs doigts, un mot qui leur gonflait la bouche, qui devait en sortir pour que, l’un de l’autre, ils l’emportent, après quoi Marie pour Hector ne serait plus une voisine, ni Hector pour Marie un voisin.

En attendant ce mot, leurs mains se goûtaient ; ils écoutaient la cloche sonner d’autres coups, la demie ou l’heure, ils ne savaient plus. Enfin Hector se pencha ; il se pencha sur Marie et lentement, comme s’il tirait le mot du plus profond de son cœur :

— Je vous aime, souffla-t-il.

Pour Marie, elle n’osa pas. Elle détourna la tête, il faisait noir cependant, mais elle n’eût pas voulu qu’il la vît. Très vite, elle répondit :

— Moi aussi.

Et pour que ce fût sûr absolument, bien pour lui, pas pour un autre, elle ajouta :

— Hector.

Ils n’avaient pas dit autre chose, et pourtant le lendemain, puis d’autres soirs, Marie quittait sa mansarde et, dehors :

— Je suis là, chuchotait la voix.

Leurs mains tout de suite se retrouvaient.

Le premier jour, elle avait eu une aventure. Vers midi, elle arrangeait un pli du rideau qui tombait mal. Son père se trouvait là :

— Qu’avez-vous, dit-il, vous êtes si rouge.

Elle avait répondu :