Page:Baillon - Histoire d'une Marie, 2è édition, 1921.djvu/86

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Jamais, commença-t-elle, je n’ai vu un homme si triste.

Vladimir se mit à rire :

— Petite sotte, ne fais pas tant d’histoires pour un type. Tu en verras bien d’autres.


XII



La parole est puissante qui d’un homme avec sa figure, ses manières, un corps qui est le sien, fait un être vague qu’on amuse un instant et qu’aussitôt on oublie : un type. Du deuxième qu’elle rencontra, elle pouvait certainement dire qu’il portait toute sa barbe, mais le troisième est-il bien sûr qu’il eût des lunettes ? Et les autres ? Vladimir avait raison : des types.

Voici comment cela se passait. À la soirée, Marie sortait. Bon. On vaut tout de même un peu plus que la dame en rouge ou la dame verte, des femmes, en somme, grossières, pour qui le métier se résume à chipoter des hommes pour en tirer des sous. « Moi, je suis Marie, j’y mets ma fierté de Marie. » Cela se voyait à sa façon de marcher, de lancer une œillade, de ne pas faire de vilains gestes quand elle était mécontente. Il survenait un type : « Do you speak english ? » Elle répondait presque dans sa langue : « Oh ! yes, very well in the bed. » Ceux qui savaient rire souriaient et alors c’était comme ils voulaient : à l’hôtel ou dans leur chambre.