Page:Baillon - La Vie est quotidienne, 1929.djvu/15

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Comme le tableau, il a bien fallu s’en débarrasser quelque part. La scène serait vide, s’il n’y avait un gros bonhomme de poêle. Il attend. Il fume. Dix pipes à la fois. De grosses bouffées. Elles empestent, mais ne chauffent pas. Dans une pièce que l’on ne voit pas, Madame fait des exercices avec sa voix : Ah-aaaaah ! de bas en haut, puis Ah-aaaaah ! de haut en bas comme sur une échelle. Avec la fumée du poêle, les relents des roses du premier acte, ces Ah-aaaaah ! composent l’atmosphère. Autres accessoires : une fenêtre à gauche, une porte à droite, invisible quelque part une autre porte. Pour des raisons que l’on verra, Monsieur, quand il travaille, exige que cette porte-là soit fermée. C’est pourquoi on l’appelle la porte.

Entre Monsieur. Sourire de l’homme qui se retrouve seul et va se mettre enfin à sa vraie besogne. Celle qu’il a faite antérieurement, ne compte pas. Coup d’œil amoureux à ses chères paperasses. Légère toux à cause du poêle. Bast ! Il ouvre la fenêtre, endosse un manteau, s’installe. Il écrit tout de suite.

Madame, en sourdine.

Ah-aaaah ! Ah-aaaah !

Puis tout à coup, comme si on la violait. — Ah ! ah ! ah ! ah !