Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/245

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La seconde fois, mes roses presque flétries, s’étaient changées en vieil ivoire :

— Je ne veux pas les jeter. Elles viennent de vous.

Comme ces paroles eussent été bonnes — après le sceau ! Je n’osai parler du sceau.

Avant la troisième visite, Dupéché vint :

— La noce aura lieu dans quinze jours. Tu viendras, tu amèneras Mlle  Jeanne.

Il lança son clin d’œil à maman. Bien que son invitation me parût louche, j’eus la bêtise de promettre. Je dus en parler à Jeanne. Elle accepta. Les roses n’étaient plus dans le vase. À même la cheminée, elles ressemblaient à quelque chose de mort qui attend la poussière pour mourir davantage. Jeanne en voulait conserver deux. Elle me les montra entre les feuillets d’un livre.

— Oh ! Jeanne.

N’en trouvant pas de meilleur, j’employai le mot idiot :

— Vous m’aimez donc un peu ?

— Vous le savez bien.

On causa longtemps. À un moment je dis : « tu » et l’on resta à « tu ». Ce fut si doux, que ma pensée remonta au plus haut étage où il ne s’agissait pas de sceau. Quand je fus seul, j’eus une crispation. Jeanne avait montré les roses entre les feuillets du livre qu’elle