Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/87

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et dame, s’il me fallait recommencer… Mais en ce temps ! Ô Varia, Varetchka ! comme cette herbe, un être se consumait pour toi. Cette pierre je l’avais prise toute chaude parce que ta main s’y posait. Cette écorce… Je filais loin dans mon rêve.

Je ne me rappelle plus au juste comment cela se passa. Le travail de la pensée est sournois. On s’imagine des faits, on se les raconte, un peu de vrai, beaucoup de faux. Un beau jour, je me trouvai devant une histoire où tout fut vrai.

Il y eut ceci :

Varia, si belle en silhouette sur le soleil, Varia s’exposant à la mort, oui, à la mort au bord du gouffre, Varia m’aimait. Elle ne voulait pas le dire ; elle ne pouvait le cacher et moi, dès le début, oh ! comme je l’aimais ! Et son doigt sur les lèvres ! Peut-être bien que, les premiers jours, j’avais douté. Je ne doutais plus. Certainement elle l’avait posé sur les lèvres, ostensiblement, à plusieurs reprises. Il signifiait sa volonté. Mon silence qu’elle exigeait, son cœur qu’elle me donnait, un serment de l’un à l’autre : qu’elle resterait ma reine, que je resterais son page, lié par cet engagement sacré qu’est un vœu : à jamais, à jamais, à jamais.

L’aventure du lit me gênait quelquefois.