Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/86

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Le poing de papa ne s’abattit pas que sur la table. Je me claquemurai dans moi.

C’est alors que je commençai ma vie stupide. Comme elle me semblait belle ! Que l’on pense à mes rêves, mes scrupules, mon besoin que les choses durent. Tout cela fut ramené sur ma Varetchka. On m’avait placé dans une école « pour devenir quelqu’un. » Des cubes, des roues, des sphères. Je me souviens d’une leçon de géométrie : « Par un point pris sur une ligne droite, on peut élever une perpendiculaire ; on ne peut en élever qu’une seule. »

— Et vous, demanda le professeur, que remarquez-vous dans ce texte ?

— On peut, répondis-je en appuyant sur « peut », élever une perpendiculaire. Mais on ne le fera pas.

Ma réponse fit le tour des classes comme autrefois mon « Y nazent ». Mais je ne plaisantais pas. Qu’est-ce que cela me faisait, une perpendiculaire ? J’avais de gros cahiers. Ceux-là, oui, me servaient. Je les montrais le soir à mes parents : « Je vais étudier ». Vite, je me bouclais dans ma chambre. Pauvres cahiers ! J’étalais dessus le mouchoir, l’écorce, la pierre. J’allumais de la lavande. Cela sentait le brûlé. L’odeur passait sous la porte. J’entendais papa : « Il va nous asphyxier »,