Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/220

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— Ne fais pas la jeune fille, petit mystérieux. Tu seras de notre noce, nous de la tienne. En attendant, embrasse ma fiancée. Je te permets.

« Évidemment, pensai-je, on ne craint pas une bourrique. » Avec ses gros poings dans nos dos, il nous envoya l’un sur l’autre. Sauf la main que je serrais en partant, je n’avais jamais touché sa Louise. Son œil gauche loucha. Sa peau contre ma joue était douce. Elle sentait le sucre, la vanille, avec un parfum en plus, celui sans doute de son rouge-confusion. Sa bouche frôla la mienne dans le coin et bougea : un vrai baiser. J’y retrouvai le goût des raisins de tantôt. Un baiser ne dure qu’une seconde. Je n’aurais jamais cru qu’une seconde pût durer si longtemps. Quand ce fut fini, je sentis à la lourdeur de mes yeux, qu’ils avaient cette expression pâmée qui me dégoûtait chez Dupéché au sortir des bras de sa Louise. Avec elle, je n’eusse pas été bourrique. Ce fut ma première idée.

— À la bonne heure, ricana Dupéché. À charge de revanche.

Ce mot me fit frémir. Je connaissais trop mon Dupéché : il ne disait rien au hasard.

La fête se poursuivit comme si de rien n’était. Dupéché ramena des bouteilles qu’il