n me l’avait adjoint comme aide pendant les coups de feu. Il parlait trop. J’ai suggéré aux patrons :
— Vous cherchez quelqu’un pour les faits divers. Prenez Cédron : un malin.
Ils l’ont pris.
Un jaloux vient d’étrangler sa femme, un incendie éclate, Cédron l’apprend. Il va. Il arrive avec les juges, parfois avant. Le cadavre gît par terre, l’incendie flambe : Cédron flaire, palpe, interroge. Psychologie du meurtrier, état de sa fortune, étendue du sinistre, il ne savait rien : il sait tout. Ce qu’il ne sait pas, il l’invente. Cela fait des lignes.
Peut-être se trompe-t-il ; peut-être découvre-t-il des histoires qu’il vaudrait mieux recouvrir, et cela n’est pas propre :
— Que voulez-vous, dirait Cédron. Il faut que les lecteurs sachent.
Il faut surtout que Cédron vive, que demain les patrons, brandissant un bout de ficelle — ne puissent gronder :
— Tel journal nous a battus de tout cela.
Ceci pour les affaires importantes. Les petites nous arrivent par les agences, rédigées sur papier carbone : montres volées, chevaux qui s’emballent, enfants noyés, il s’en rencontre,