Page:Bainville - Bismarck.djvu/144

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M. Henri Albert à écrit une série d’attachantes études où il montre quels furent l’attitude, les sentiments, les pensées de Gœthe et de la petite cour de Weimar pendant les événements de 1806. On y voit comment Napoléon recueillait encore les fruits de l’excellente politique de la monarchie française. Notre politique avait consisté, pendant des siècles, à diviser l’Allemagne, à émietter ses forces, à mettre ses innombrables États dans notre dépendance financière, militaire et diplomatique autant que sous notre influence intellectuelle. Culture, civilisation, étaient en Allemagne le synonyme de France. Tout ce qui était français était donc certain d’être bien accueilli. C’est encore ce qui arriva à Napoléon et à ses armées. Loin de les regarder comme des envahisseurs barbares, c’est tout juste si les Allemands ne se sentaient pas honorés de leur présence. Les documents, fragments de mémoires et de lettres qu’a réunis M. Henri Albert, sont caractéristiques à cet égard. Un peu pillés et houspillés par les soldats de Bonaparte, les gens de Weimar sont tout de même plutôt heureux, et même un peu fiers de « recevoir » des Français. Les troupes prussiennes, après leur passage et leur séjour dans le duché, durant les mois qui précédèrent la déroute, n’avaient laissé que de mauvais souvenirs. « Les chers Prussiens ne sont pas précisément les bienvenus », écrit Gœthe le 5 janvier. Les Français les remplacent après le 14 octobre. Ils commencent par envahir la maison de Gœthe, boivent son vin, lui prennent son lit, manquent même de