CHAPITRE III
SOUS LOUIS-PHILIPPE, LA FRANCE S’ENNUIE D’UNE LONGUE PAIX
Louis-Philippe, par Alexandre Dumas
LES doctrinaires et la bourgeoisie n’eussent pas réussi le coup de Juillet sans le concours du peuple qui, d’ailleurs, ne voulait pas la même chose qu’eux. Ce malentendu initial condamnait d’avance la monarchie de Louis-Philippe.
Thiers, Guizot, Mignet et les autres beaux esprits de 1830 avaient fait un raisonnement naïf. Hantés par l’histoire d’Angleterre, ils avaient cru pouvoir recommencer la substitution dynastique de 1688 et, en fondant une monarchie nouvelle où le roi régnerait sans gouverner, assurer le triomphe des classes moyennes en même temps que celui des idées libérales et du régime parlementaire. Pure construction de l’esprit qui ne tenait aucun compte des réalités humaines. L’élévation politique de la bourgeoisie apparaissait sans doute aux bourgeois comme la consécration de toute l’histoire de France. Et ils ne se doutaient pas que cette suprême justice ne dût aussi contenter les prolétaires, puisque l’accès du tiers état était libre, que le droit d’ascension était ouvert à tous, et qu’il suffisait, selon le mot fameux, de s’enrichir pour devenir électeur et