Page:Bainville - Heur et Malheur des Français.djvu/448

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la politique. Dans leurs remontrances, ils attaquèrent le Florentin Concini, comme ils attaqueront plus tard Mazarin avec lequel il eut des ressemblances. Cette agitation des gens de robe, qui affectaient de parler au nom du bien public, entraîna celle des princes qui entraîna à son tour celle des protestants. C’est au milieu de ces désordres que Concini appela aux affaires des hommes énergiques, parmi lesquels Richelieu, qui fut nommé secrétaire d’État à la guerre et se mit en mesure, comme il l’annonça aussitôt, de « châtier les perturbateurs ».

Quand ce ne serait que pour avoir inventé Richelieu, Concini ne devrait pas passer pour un si mauvais homme. Son tort fut d’aimer l’argent autant que le pouvoir et, par là, de se rendre impopulaire. Dans la haute fortune qu’il devait à la faveur de Marie de Médicis, il manqua aussi de tact et de prudence et il humilia le jeune roi en affectant de le tenir à l’écart des affaires. Louis XIII venait d’atteindre seize ans. Il se confia à un gentilhomme provençal, de sa maigre suite, Charles d’Albert de Luynes, qui n’eut pas de peine à le convaincre que son autorité était usurpée par le maréchal d’Ancre. Mais comment renverser le tout-puissant Florentin, maître du gouvernement, des finances et de l’armée ? Il n’y avait d’autre ressource que l’audace. Le 24 avril 1615, au moment où Concini entrait au Louvre, il fut arrêté au nom du roi par Vitry, capitaine des gardes, et, comme il appelait à l’aide, tué à coups de pistolet. « Je suis roi maintenant », dit Louis XIII à ceux qui le félicitaient. Et il congédia les collaborateurs du Florentin, Richelieu lui-même, auquel il adressa de dures paroles que Luynes s’empressa d’atténuer, devinant l’avenir de l’évêque de Luçon. Marie de Médicis fut éloignée.

Depuis la mort d’Henri IV, quel que fût l’homme au pouvoir, la politique ne changeait guère. Comme les autres, Luynes voulut éviter les aventures et un conflit avec l’Espagne, au-dedans maintenir l’ordre, contenir les protestants. Cependant il se préparait en Europe des événements qui bientôt ne permettraient plus à la France de rester neutre. La lutte entre catholiques et protestants recommençait en Allemagne. À la vérité, mais on ne le vit pas tout de suite, ce n’était pas une lutte de religions, c’était une lutte politique. La maison d’Autriche reprenait les plans de Charles Quint. Elle catholicisait